Collapsologie et Apocalypse

Entrée en matière.

Jean-Patrice Cornaz

Lorsque j’ai découvert le livre de Pablo SERVIGNE et Raphaël STEVENS, Comment tout peut s’effondrer, [1] j’ai eu une sorte de révélation. Révélation de l’état avancé de délabrement du monde. Pour être plus précis, ce que ce livre m’a fait découvrir, c’est que la manière de vivre occidentale qui s’étend partout depuis – en gros – la révolution industrielle britannique (fin du 18è siècle), cette manière de vivre et l’organisation de la société qu’elle exige par la mise en œuvre de ses moyens de production, cette manière-là a deux effets majeurs.

Le premier et le principal, c’est que l’exploitation effrénée des ressources et les rejets de pollution menacent les conditions mêmes de la possibilité de la vie sur terre, principalement les capacités du système à se renouveler et à se maintenir, et donc à continuer à garantir les conditions d’existence du vivant, tant animal, donc humain, que végétal. Ces menaces ne sont pas théoriques : la disparition d’espèces animales toujours plus nombreuses (notamment les insectes pollinisateurs indispensables à la production de fruits et légumes), la pollution des eaux et la diminution de la qualité des sols, les feux de forêts toujours plus nombreux et à grande échelle sont des réalités quotidiennes.

Le second, c’est le fait que l’humanité est devenue hors-sol, à savoir que la plupart des humains aujourd’hui n’ont plus de rapport réel à la terre, à l’eau, ni à la production de leur nourriture et de leur énergie. Pour cela, nous sommes tous dépendants d’un réseau industriel et financier qui donne l’illusion que nous sommes « au-dessus » de ces choses concrètes. Supermarché, pompe à essence, électricité et eau courante sont des services qui nous sont fournis et garantis sans efforts de notre part. Ce système international est très fragile : des prix trop élevés de l’énergie (pétrole et charbon) tout comme des catastrophes climatiques ou sociales pourraient en interrompre les flux et nous rendre la vie impossible, sans parler de sa fragilité intrinsèque : la longueur des chaînes d’approvisionnement les rend vulnérables.

La découverte de ces faits m’a permis de voir à quel point nous sommes reliés à la Terre, ou, plus précisément, que nous faisons partie intégrante de ce que SERVIGNE et STEVENS (avec d’autres) appellent le « Système-Terre »[2] , c’est-à-dire que nous interagissons avec notre planète et le reste du vivant. Cela semble évident aujourd’hui, mais pour ma part, j’ai hérité massivement de l’idée que la Terre est la scène d’un théâtre sur laquelle se jouent les destinées humaines et qu’elle ressemble à un inépuisable gâteau mis à notre disposition. Or, si le système Terre est généreux, il n’est pas infini : on le sait depuis 1972, lorsqu’est sorti le rapport Meadows Limits to Growth, Limites à la croissance[3] . À l’époque j’étais dans mes années de scolarité primaire et secondaire et il arrivait que certains maîtres, probablement au courant mais coincés par les programmes, nous parlaient de l’énergie en disant « pensez-y plus, dépensez-en moins ». Pas de quoi nous faire voir les problèmes. Durant la formation théologique universitaire, cela n’était pas abordé de front, quand bien même Moltmann parlait de la création autrement[4] et que paraissait La création[5] de Pierre GISEL qui faisait voir comment la modernité avait renversé l’idée du « monde clos sublunaire »[6] de l’Antiquité et posait les bases pour une réévaluation de la pensée théologique sur les réalités du monde. De plus, dans les églises que je fréquentais en ces temps-là, on soupçonnait de collusion avec le paganisme ou le « New Age » quiconque parlait de façon un peu trop appuyée à propos des liens entre la Terre, les animaux et les humains.

Bref, après la lecture de SERVIGNE et STEVENS[7] , la certitude m’est apparue que ça ne peut pas continuer comme ça.

Le monde et les conditions de vie « à l’Occidentale » ne peuvent se perpétuer, s’étendre et croître encore en population, production, énergie, voyages, nourritures, biens et services comme jusqu’à présent. Nous allons vers une rupture : bien des limites sont dépassées et d’autres sont en passe de l’être. Jusqu’à l’irréversibilité. L’équilibre est instable. Nos enfants et nos petits-enfants, nous-mêmes peut-être, allons devant de gigantesques difficultés[8] .

Cela m’a fait peur. Une peur d’apocalypse : c’est le premier mot qui m’est venu à l’esprit. Je me suis demandé si ces choses difficiles qui nous attendent avaient un quelconque rapport avec l’apocalypse entendue comme fin des temps. Mais, à la réflexion, c’est-à-dire après bien quelques nuits d’angoisse et de doutes – je me suis tourné vers le livre biblique de L’Apocalypse de Jean pour comprendre qu’il n’avait pas pour but de semer la terreur. La collapsologie non plus d’ailleurs !

Pourtant, l’une et l’autre parlent de « fin du monde » ou de « fin d’un monde », à tout le moins. Voyons cela.

Le livre biblique de l’Apocalypse.

Dans le langage courant, l’apocalypse, c’est la catastrophe. Depuis les peintres anciens jusqu’aux films comme Elyseum ou Le monde d’après, la mention de l’apocalypse est utilisée dans un contexte de fin violente, catastrophique, immensément dramatique.

Cet ensemble d’images effrayantes vient de la représentation que s’est faite l’Occident après l’introduction dans la liste des livres de la bible chrétienne de l’Apocalypse de Jean. Placée à la fin de la Bible, elle relate des visions accordées à un chrétien nommé Jean, visions dans lesquelles il voit – entre autres – des chevaux tuer le quart de la population du monde « par l’épée, la famine, la mort et les fauves de la terre ~ (6. 8), les montagnes s’effondrer (6. 13) et le ciel s’enrouler sur lui-même comme on roulait un papyrus dans l’antiquité (6. 14). Il voit également un tiers de la mer se changer en sang (8. 7), le jour et la nuit perdre le tiers de leur clarté (8. 12), l’abîme ouvert et en jaillir des sauterelles pareilles à des scorpions qui font périr les non-croyants (9.4), ainsi que des bêtes faiseuses de miracles (13), un dragon (12), des anges qui vendangent les âmes pour la colère de Dieu (14. 14-20), colère qui s’illustre par un bain de sang « jusqu’au mors des chevaux ~ (id). Bien qu’on y trouve aussi des aperçus de la gloire divine, une fin lumineuse avec la venue du règne de Dieu enfin reconnu pour mille ans[9] , les nouveaux cieux et la nouvelle terre (21)et la fameuse Jérusalem céleste « qui descendait du ciel, d’auprès de Dieu ~, demeure d’éternelle béatitude pour les justes (21. 10, 27), il y a dans ce livre de quoi impressionner et enflammer les imaginations !

Mais l’Apocalypse de Jean est-elle vraiment le terrifiant journal de demain ?

Prenons un peu de recul.

Tout d’abord, comme l’écrit Christophe Nihan[10] ,

Le terme d’« apocalypse » vient du grec apocalupsis, ou « révélation ». Ce titre est donné pour la première fois à un écrit dans l’Apocalypse de Jean, laquelle s’ouvre par la déclaration suivante : « Révélation (Άποκάλυψις) de Jésus Christ que Dieu lui a donnée pour montrer à ses serviteur ce qui doit arriver bientôt » (1. 1).

Le terme désigne dans la recherche historique tout un ensemble de textes qui se présentent comme des révélations venues directement de Dieu ou d’un envoyé accrédité[11] et reçues par un personnage prestigieux (Hénoch, Abraham, par ex.). Dans le livre de l’Apocalypse, c’est Jésus-Christ qui donne la révélation à Jean, mais des anges participent également (par exemple aux chapitres 10 et 17).

Comme il y a beaucoup de textes de révélation dans le Judaïsme du 4ème siècle avant notre ère jusqu’au 1er siècle après (mais aussi, dans le même temps, dans des régions comme l’Egypte, l’Iran ou la Mésopotamie), on désigne ces écrits par l’expression « littérature apocalyptique »[12] .

Nous avons donc affaire à cette époque au Proche et au Moyen Orient à une floraison d’écrits d’horizons divers mais avec des caractéristiques forts semblables :

Au point de vue des idées, on trouve dans ces textes d’autres aspects saillants :

Ces quelques caractéristiques sommairement évoquées sont le propre de toute cette littérature apocalyptique qui veut ainsi prodiguer un savoir certain – sur le monde, l’histoire et leurs secrets profonds – puisqu’il vient de Dieu.

On notera que, dans le cas des apocalypses juives, le dialogue avec les textes et traditions bibliques est maintenu vivant. Ainsi, dans le cas du lien avec la littérature dite de Sagesse (les livres des Proverbes, du Qohélet ainsi que quelques Psaumes), les apocalypses sont en contrepoint. Si, selon les sages, le juste et le fidèle sont récompensés sur la terre par la richesse, la descendance et une mort paisible[13] , à l’époque des apocalypses on constate plutôt que le juste périt violemment et que le méchant prospère par ses manigances. On peut dire que la littérature apocalyptique juive,

...est cette sagesse révélée qui permet de lever les contradictions enregistrées au plan de la sagesse empirique (cf. Qohéleth !), en révélant le véritable ordre secret qui régit le cours du monde et de l’histoire. Sur ce point, la sagesse apocalyptique peut être vue comme une réaction tant à la sagesse traditionnelle qu’à sa mise en question dans certaines traditions sapientiales du Second Temple[14].

En considérant le contexte historique d’apparition de cette littérature dans le Proche et le Moyen Orient anciens, nous nous trouvons en pleine période héllenistique. En effet, dès les conquêtes éclair menées par Alexandre le Grand, jeune empereur âgé de 20 ans (dès 336 av. notre ère et jusqu’à sa mort en 323 av. notre ère), les régions conquises furent traversées de troubles et de tensions qui tournaient autour du pouvoir bien sûr, mais aussi autour de questions culturelles. Avec Alexandre, c’est la culture grecque qui entre en contact avec les cultures traditionnelles juive, perse, égyptienne, mésopotamienne. Elles se heurtent à un empire qui les confronte à la nouveauté, qui sape leur façons ancestrales de se représenter le monde et les dieux, et qui bouleverse leur organisation politico-sociale.

L’effet simultané de la logique d’empire, des querelles de pouvoir succédant au décès d’Alexandre le Grand et le contact avec une nouvelle culture prisée des élites donne lieu à des guerres et des révoltes incessantes au nom des identités blessées[15].

Dans ce contexte, il est possible de préciser ce qu’il en est de la question qui taraude la culture juive et à laquelle l’apocalyptique se veut une réponse. Il s’agit de la question de la justice de Dieu : comment Dieu est-il juste, fidèle à ses promesses quand les impies prospèrent par la violence en persécutant les juifs fidèles qui ne veulent pas plier le genou devant les despotes illégitimes ? Comment Dieu est-il fidèle quand la Terre d’Israël est occupée et le Temple sous supervision étrangère ? Quand les élites veulent gouverner « à la grecque » , par la force s’il le faut ? : La fracture s’installe entre « des populations hellénisées sans que leurs traditions ancestrales l’aient été pour autant »[16] . Ces questions donnent lieu à des troubles incessants qui trouveront leur acmé lors de la crise Macchabéenne[17] . Les apocalypses donnent le change : Dieu révèle par des visions le secret des choses et des événements. Il avait tout prévu dans son plan arrêté à l’avance, les justes qui périssent et les injustes qui les auront fait périr seront jugés, les uns récompensés, les autres punis. La résistance vaut donc la peine, oserions-nous ajouter. Issues de milieux divers, difficiles à déterminer avec précision, les apocalypses juives sont toutes comme aiguillonnées par cette question de la justice de Dieu, dans un tissu politico-culturel complexe dans lequel tout n’est pas noir ou blanc, malgré le dualisme marqué de cette littérature <à name="r18"> <à href="#nm18">[18] .

Le christianisme naissant et la littérature apocalyptique.

Historiquement, c’est dans ce contexte qu’est né le christianisme : les idées et les représentations apocalyptiques étaient connues, à tel point que le savant allemand Ernst KÄSEMANN à pu décrire l’apocalyptique comme « la mère de la théologie chrétienne » [19]. Cependant, bien que les auteurs du Nouveau Testament soient indéniablement marqués par les représentations apocalyptiques [20] , il n’y a que l’Apocalypse de Jean pour être du genre apocalyptique. Voilà qui devrait rendre attentif au fait que le christianisme primitif a eu assez tôt une certaine méfiance envers des « révélations » ésotériques ou extatiques. D’ailleurs, ce n’est pas sans difficultés que ce livre fut admis à entrer dans le canon biblique. En effet, on dut constater que le recours à des révélations provenant directement de Dieu étaient problématiques : on avait affaire, quasi toujours, à une dissidence critique des communautés ou de la société au nom d’une pensée utopique et impatiente [21] . Cette méfiance n’est pas d’abord un réflexe d’une hiérarchie ecclésiastique chatouilleuse, mais elle s’enracine à mon sens dans la compréhension de l’Evangile lui-même, qui annonce non pas une séparation nette entre justes et injustes, mais un pardon pour les injustes et une remise en question de ceux qui se croient justes (cf. Lc. 18. 9- 14, par exemple). Ce que Jésus proclame n’est pas une colère imminente mais un temps ouvert pour changer de comportement [22] . Ses actes de proximité envers les pécheurs et les damnés (Mc. 2. 17), de même que la perception par ses disciples de sa mort libre d’esprit revanchard en témoignent (Lc. 23 34). La résurrection, dans ce contexte, n’est plus la prémisse terrifiante du jugement, mais le « symbole de l’espérance » [23] , en ce que Jésus devient le « premier-né d’entre les morts » (Col. 1.18). En Jésus Christ, la justice de Dieu n’est pas envisagée comme un « règlement de comptes » final , mais comme un réorientation de l’existence présente, motivée par le dynamisme divin qui, au lieu de punir les responsables de la mort de Jésus Christ, lui redonne la vie et, par là­même offre à tous le temps et la possibilité du changement.

Encore une fois, on constate que, de l’abondante littérature apocalyptique, seuls le livre de Daniel dans la Bible hébraïque et celui de l’Apocalypse de Jean dans le Nouveau Testament ont été retenus dans le canon. Ce fait même – ce choix[24] – a des sources et des conséquences théologiques importantes pour la lecture et l’interprétation de l’Apocalypse de Jean.

Points saillants de l’Apocalypse de Jean

Selon ma compréhension actuelle, le livre de l’Apocalypse de Jean, bien que « révélation de ce qui doit arriver vite »[25] , n’est pourtant pas le « journal de demain ~. Ce qui doit arriver, c’est Jésus Christ lui-même (il est dit à plusieurs reprises « je viens bientôt » et Jean répond « Amen, viens Seigneur Jésus »[26] ), ce sont les nouveaux cieux, la nouvelle terre et la nouvelle Jérusalem[27] , la demeure de Dieu parmi les hommes[28] , c’est-à-dire la plénitude de ce que Jésus est venu vivre et annoncer. Ce que le livre raconte également, c’est que cette venue est précédée par des événements cosmiques assez terrifiants qui témoignent de ce que Dieu prend position face au chaos et à l’injustice, au mal, et que ce dernier se rebiffe vainement, quand bien même il fait des dégâts. Et il y a des moments de paix lumineuse que sont les descriptions régulières de contemplation de la gloire céleste[29] . Cette alternance entre moments sombres et lumineux est au service de l’affirmation de la grandeur de Dieu face au mal et aux puissances de la mort. De ce fait, la foi chrétienne y est exposée comme

« une aptitude persistante et durable à vivre dans une assurance totale l’incalculable ou imprévisible alternance du drama et de l’otium »[30]

La perception de l’au-delà au cœur des drames figurés par les catastrophes et les bêtes du récit, fait de cet au-delà une

« force lumineuse de vie et non plus de survie »[31]

De ce fait, la foi comme

« expérience assumée de la dialectique du drame et de le la gloire implique la grâce d’entrevoir le passage, radical et absolu, de l’existence à la vie. »[32]

Dans cette perspective, le récit de l’Apocalypse n’est pas une rêverie, un décollement hors du temps, mais une fresque de la condition historique de l’Eglise au cœur du monde de tous (cf. les événements qui affectent l’ensemble du cosmos) qui présente la foi comme patience, persévérance face aux épreuves de l’existence, aux persécutions et aux injustices[33] .

De cela, on peut dire que l’Apocalypse de Jean révèle le cœur des enjeux de l’histoire, à savoir un terrain d’épreuves et de luttes constantes contre le chaos qui détruit le monde et les vivants. Là­contre, la foi seule permet de vivre vraiment, non la violence répondant à la violence. Le monde nouveau est ce que Dieu fait, d’abord en Jésus Christ, puis dans l’Eglise et enfin en en faisant venir la plénitude proprement inimaginable.

Le jugement manifesté à la fin[34] sera « selon les actes »[35] . Il vaut la peine de remarquer qu’il ne se fera pas sur le critère de l’appartenance à l’Eglise ou au peuple de Dieu, comme on pourrait s’y attendre, vu le nombre de fois où il est parlé des « élus », des « témoins » et du « peuple » qui sont exhortés à la patience et qui, selon toute apparence, sont dans le « bon camp ». Mais voilà : « chacun fut jugé selon ses actes ~, ce qui signifie que c’est seulement à ce moment-là que les choses deviennent patentes. Le jugement n’appartient qu’à Dieu. Auparavant, tout reste ouvert[36] . Cela fait que la question de la justice qui travaille les apocalypses juives en tant que problème des promesses divines inaccomplies ou détruites, et de la question du sort des fidèles, s’élargit au monde. Si le jugement se fait en fonction des œuvres et non des appartenances, des confessions ou des croyances, c’est bien que Dieu s’intéresse à la justice ici et maintenant, et partout et toujours. Le jugement selon les actes, est ainsi une révélation de ce qui était vraiment à l’œuvre en toute existence.

Résumons.

La littérature apocalyptique est un phénomène répandu dans le Proche et le Moyen Orient ancien dès l’époque hellénistique jusqu’aux deux premiers siècles de notre ère. Elle témoigne, par le recours à des révélations données à des prophètes ou des voyants, d’un savoir sur le monde et l’histoire qui fait office de résistance à la transformation d’un monde traditionnel soumis à des logiques d’empire.

Dans le monde juif, la littérature apocalyptique expose cette résistance en termes de vérification historique de la justice divine: comment se fait-il que le peuple que Dieu s’est choisi soit occupé, son Temple détruit et les fidèles égorgés ? Les révélations reçues montrent que tout cela a un sens, que Dieu est en contrôle et qu’il sera justifié à la fin des temps. Ce faisant, cette littérature donne dans un dualisme à la fois philosophique mais surtout social : il y a une frontière nette en les fidèles et les infidèles.

Dans le christianisme, cette littérature, bien qu’influençant profondément le mouvement, n’est pas reprise telle quelle. Elle fait partie du contexte d’apparition du christianisme et est travaillée par lui. Il ne s’agit plus de prédire les temps et les événements entourant la victoire de Dieu et de son peuple[37] , mais d’attendre avec patience ce qui est déjà donné au travers de la foi en Jésus Christ. Au lieu d’une connaissance cryptée et anticipatrice de l’histoire et de son déroulement, c’est bien une révélation des ressorts de celle-ci qui a lieu. L’histoire du monde est une lutte persévérante contre les forces du chaos. La foi n’est donc pas de tout repos, mais se heurte à cette épreuve douloureuse. Les chrétiens, comme les autres, l’expérimentent dans leur chair dans la certitude que leurs actions de résistance ne sont pas vaines, puisque la plénitude est si proche qu’elle peut être déjà vécue au cœur du monde : Jean ne voit-il pas déjà la liturgie céleste ? La vivacité de l’espérance offerte aiguise encore la question de la justice : jusqu’à quand ? Encore un peu de patience : « je viens bientôt » dit le Christ (Ap. 22. 20).

Enfin, la question de la justice est élargie au monde entier, non plus seulement à une province de celui-ci, fut-ce le peuple d’ Israël, ou l’Eglise universelle.

Et la collapsologie alors ?

À première vue, La collapsologie n’a donc pas grand-chose à voir avec l’Apocalypse de Jean. Sinon que l’effondrement éveille lui aussi des scènes de catastrophes qui entrent en résonnance avec l’imaginaire courant au sujet de l’Apocalypse. De plus, comme il évoque l’effondrement non seulement de la civilisation techno-industrielle mais encore des conditions terrestres favorables à la vie[38] , il contient une dimension globale qui le rapproche de la littérature apocalyptique.

Cela dit, il y a dans les récits de l’Apocalypse et de l’effondrement des différences capitales : alors que celle-là est le fait d’une expérience de « révélation », celui-ci repose sur l’analyse patiente d’une multitude de résultats de recherches dans différents domaines : biologie, biodiversité, climatologie, études environnementales, géologie, énergies fossiles, économie, sociologie, théorie des systèmes etc... C’est un véritable « état des lieux »[39] qui lui sert de référence, dans le but de

nous éclairer sur ce qui nous arrive et qui pourrait nous arriver, c’est-à-dire de donner un sens aux événements[40].

Et ces événements sont graves : dans tous les domaines passés en revue par SERVIGNE et STEVENS[41] , les spécialistes s’accordent pour constater le déclin. Que ce soit l’extinction des espèces[42] , l’acidification des océans, la toujours moindre qualité et quantité des terres cultivables, la gestion de l’eau potable, nous nous approchons de limites[43] dont les franchissements auront des effets irrémédiables.

Mais il y a deux limites qui sont significatives car elles touchent tant au cœur de notre civilisation que de la vie sur terre : elles sont en rapport à la question de l’énergie. En effet, toute notre vie moderne repose sur la consommation des énergies fossiles qui sont les plus efficaces pour notre production, notre consommation et le maintien de nos modes d’existence. En une phrase,

Sans énergies fossiles, c’en est fini de la mondialisation, de l’industrie et de l’activité économique telles que nous les connaissons.[44]

Or, les réserves en charbon, pétrole et gaz de schiste sont immenses, mais non illimitées : le pic pétrolier été atteint en 2006[45] et la production issue des méthodes traditionnelles d’extraction décline depuis. Comme elles sont toujours plus difficiles d’accès, leur extraction coûte de plus en plus cher. Le rapport énergie produite / énergie investie pour leur extraction (TRE : taux de retour énergétique) va devenir trop petit. À partir d’un certain prix au baril, le pétrole devient trop cher et donc l’économie en souffre[46].

A la question de la limite des ressources en énergies fossiles s’ajoute celle de l’effet de leur consommation sur le climat. Toute énergie fossile consommée dégage du dioxide de carbone (CO2). Ce gaz dit a effet de serre, libéré dans l’atmosphère, contribue a en faire augmenter la température, ce qui entraîne toute une cascade de phénomènes perturbateurs sur les conditions de vie : incendies gigantesques, anoxie des océans, évaporation des eaux, désertification, stérilité des terres agricoles etc[47] ... Or, si l’on consommait toutes les énergies fossiles disponibles restantes, il y aurait une élévation gigantesque de la température moyenne qui rendrait la vie impossible[48] .

Ce travail de fourmi sur l’état du monde aboutit à la constatation que tous les indicateurs sont au rouge. C’est-à-dire que :

Le système politique, social et économique moderne globalisé, grâce auquel plus de la moitié des humains vivent, a sérieusement épuisé les ressources et perturbé les systèmes sur lesquels il reposait – le climat et les écosystèmes – , au point de dégrader dangereusement les conditions qui permettaient autrefois son expansion, qui garantissent aujourd’hui sa stabilité et qui lui permettront de survivre.[49]

Notre civilisation est donc dans une impasse : si elle continue de croître (ou même de se maintenir à son présent niveau), elle va réduire à néant les conditions bio-géo-chimiques nécessaires à toute vie, et si elle baisse sa consommation en énergies fossiles au point de respecter les capacités de la terre, elle devra changer drastiquement. Un changement des modes de vie est inévitable.

Ce bref constat, connu de tous et déjà « prédit » depuis la parution du rapport Meadows en 1972[50] , n’est plus contestable. Il brosse un tableau bien sombre des menaces qui pèsent, non plus sur une civilisation locale, comme on peut parler de la chute de Rome ou de la fin de l’empire Aztèque, mais sur les conditions bio-climatiques indispensables au maintien de la vie. Il y a là, proprement, une menace universelle, conséquence directe de la consommation exponentielle d’énergies fossiles nécessaires au maintien de notre civilisation. Et comme cette dernière n’a pour objectif que la croissance dans tous les domaines, c’est dans un mur que l’on se dirige en accélérant[51] .

Pourtant, SERVIGNE et STEVENS l’ont constaté, la simple description des faits, la prise de conscience d’un problème ne conduit pas de soi au changement. Il y faut autre chose. Mais quoi ? Car ce qui arrive est encore perçu comme local et temporaire : les énormes incendies en Australie en 2020, dans la forêt amazonienne, en Californie, au Portugal et même en Suède sont traités en général comme des « crises ». Or une crise, « ça passe », « ça ira mieux après ».

La multiplication des phénomènes climatiques extrêmes ou les extinctions massives des animaux ces dernières décennies[52] , malgré les efforts louables de protection qu’ils provoquent et les prises de conscience auxquelles elles donnent lieu[53] , n’arrivent pas a influencer vraiment les décideurs. Après les crises, voire pendant, « business as usual... »

Le risque est grand d’en rester a des exhortations, pieuses ou radicales, c’est-à-dire placer la question sur le terrain de la morale. Or, si l’ensemble du constat des phénomènes ne parvient pas à nous faire changer, c’est pour plusieurs raisons.

D’abord, le cadre de pensée dans lequel nous évoluons n’est pas adapté a donner du sens a ce qui arrive. Brièvement dit, nous sommes façonnés depuis trois siècles par la croyance au progrès et à la croissance, optimistes quant aux capacités technologiques à résoudre tous les problèmes qui surgissent et habitués à une vision analytique[54] du monde aux dépens d’une vision systémique. Notre vision du monde est mécaniste : nous pensons qu’il suffit de savoir pour ensuite appliquer. C’est ainsi que nous réduisons la question du changement à une question morale ou de bonne volonté[55] .

Ensuite, l’effondrement est impossible a représenter parce que notre système cognitif en est incapable : « il nous est impossible, même d’un point de vue systémique, de forger une représentation rationnelle complète de ce qui pourrait être ‘l’effondrement du monde’ »[56] . Il y a là, probablement, je le dis a titre d’hypothèse, l’incapacité de se représenter la négation, car celle-ci est toujours relative a quelque chose. Quant au néant, c’est purement impossible, car pour se faire une représentation, il faut pouvoir construire une image positive (au sens concret du mot, non au sens moral ou optimiste) afin de pouvoir s’y projeter[57] . Or le néant ne serait plus « rien ~ si l’on s’en faisait une représentation, il serait « quelque chose ».

Ensuite encore, il est notoire que nous sommes des êtres sociaux mimétiques[58] . Cela signifie que les changements qu’un individu opère ne proviennent en premier lieu ni de

son opinion ou [del sa volonté, mais [del son questionnement sur le fait qu’il agirait a condition qu’un assez grand nombre d’autres agissent aussi. L’action collective (politique) n’est pas un phénomène additif des volontés individuelles d’agir, elle est la résultante émergente des représentations que chacun se construit en observant les représentations des autres.[59]

Pour finir, nous sommes si peu indépendants de l’organisation sociale, économique et politique pour soutenir nos besoins de base qu’il nous est quasi-impossible de changer cela tout seul par un seul acte de volonté sans mettre en danger notre gagne-pain, notre habitation, notre famille. Le modèle social de la liberté individuelle a des avantages indéniables – en termes de confort certes, mais aussi et surtout d’autonomie individuelle –mais il est aveugle sur le fait qu’il repose sur une organisation sans faille des circuits de distribution de biens et services au niveau international. Il y a un effet de verrouillage[60] , de « global lock-in ».

Ainsi, la situation est complexe, c'est-à-dire que le système-Terre est fait d’interactions que nous connaissons peu ou pas complètement[61] parmi lesquelles nos manières de percevoir, d’être et d’agir ajoutent à la complexité

Avant d’aller plus loin, il nous faut examiner plus précisément ce que sont l’effondrement ainsi que le discours qui va avec, la collapsologie.

L’effondrement, c’est quoi ?

Collapsologie vient du verbe latin collabor, collapsus sum, qui signifie tomber ensemble ou tout d’un bloc. Il y a là l’image d’une maison, d’une paroi rocheuse ou d’un homme qui, frappés petit a petit ou emportés par un choc violent, s’effondrent d’un coup[62] . C’est a cela que les discours collapsologiques renvoient : donner une idée de ce vers quoi le monde court. Or, s’il est facile d’imaginer une maison s’effondrer, il est beaucoup plus ardu de se représenter ce qu’est l’effondrement de notre civilisation et des conditions de vie sur la planète. Nous n’arrivons pas à représenter ce que serait le monde sans notre manière d’y vivre.

Il y a pourtant une définition classique de l’effondrement et c’est

le processus a l’issue duquel les besoins de base (eau, alimentation, logement, habillement, énergie, etc..) ne sont plus fournis à un coût raisonnable à une majorité de la population par des services encadrés par la loi.[63]

Cette définition lapidaire semble trop propre a notre mode de vie a l’Occidentale, trop « anthropocentrique » : elle n’intègre pas suffisamment le reste du vivant et de la planète[64] mais elle met sur la piste. L’atteinte aux besoins vitaux qu’elle évoque appelle un développement et une réflexion qui permet de « de jouer sur plusieurs tableaux », à savoir de

traiter aussi bien des taux de déclin de la biodiversité que des émotions liées aux catastrophes, ou de discuter de risques de famines. C’est une notion qui touche aussi bien des imaginaires cinématographiques très largement partagés (...) que des rapports scientifiques confinés ; qui permet d‘aborder différentes temporalités (...) tout en navigant a l’aise entre passé et futur ; ou qui permet de faire le lien entre la crise sociale et économique grecque et la disparitions massive des populations d’oiseaux et d’insectes en Chine ou en Europe. Bref, c’est elle qui rend vivante et tangible la notion d’Anthropocène .[65]

L’effondrement, le discours collapsologique permet de faire le lien entre les phénomènes de déclin que repèrent les études scientifiques et la vie de tous les jours, entre « l’Anthropocène et votre estomac ».[66] Il permet de s’y projeter existentiellement.

L’effondrement incite a non seulement se demander ce qu’on va faire quand il n’y aura plus d’eau qui arrivera dans les maisons, plus de chaînes de distribution alimentaire, plus ou très peu d’électricité ni d’huile de chauffage ni de service d’ordre, mais encore comment ces choses vont-elles arriver, et quand ? S’il est risqué de se faire futurologue[67] , il n’est pas nécessaire de se faire de l’effondrement une image «systémique rationnelle complète »[68] , pour se représenter ce que signifie l’effondrement appliqué a plusieurs domaines[69] .

Pour la finance, il y a effondrement lorsque la disponibilité de argent et l’accès au capital se perdent, parce que les institutions financières (banques, établissements d’assurances) ne peuvent plus garantir les avoirs financiers. On l’a vu se produire en 2001 en Argentine, par exemple. Florissent alors des monnaies locales.

Pour l’économie, il y a effondrement lorsque sont rompues les chaînes d’approvisionnement de toute sorte et que l’échange de biens et de services chute drastiquement. L’économie informelle explose alors : troc, recyclages et brocantes deviennent l’ordinaire.

Politiquement, il y a effondrement lorsque les institutions étatiques (écoles, infrastructures de transport, hôpitaux, police, services sociaux) ne peuvent plus être maintenues. Ce n’est pas forcément le chaos et la violence de tous contre tous, mais cela nécessite que les communautés locales, quartiers, villages fassent tout eux-mêmes, s’ils en ont les moyens.

Socialement, l’effondrement signifie que les associations caritatives ordinaires n’ont plus de ressources et ne peuvent pallier aux faiblesses du filet social étatique. Dans ce cas, « il vaut mieux faire partie d’une des petites communautés encore soudées dans lesquelles la confiance et l’entraide sont des valeurs cardinales »[70].

Culturellement, l’effondrement a lieu lorsque les gens perdent leurs capacités d’empathie et d’identification a autrui. Il ne croient plus dans la bonté de l’humanité. Suite aux pénuries et aux difficultés, c’est le repli chacun pour soi. Il a également lieu lorsque les sociétés sont incapables de transmettre leurs connaissances de tous ordres. On comprend que si les écoles et hautes académies s’effondrent, la formation d’experts dans des domaines comme le nucléaire pourraient poser des problèmes pour le maintien opérationnel des centrales nucléaires de par le monde.[71] Culturellement toujours, l’effondrement pourrait signifier qu’il ne resterait a terme que l’oralité, et qu’il faudrait se la réapproprier.

On peut ajouter un autre domaine, celui de l’effondrement écologique, lorsque l’environnement lui­même ne se prête plus à soutenir la vie humaine. Et ça fait peur : dans un désert ou un four, plus beaucoup de chances de survie.

S’il est aisé de se représenter ces effondrements sectoriellement, la tâche devient plus ardue lorsqu’il s’agit de les articuler de façon diachronique : les événements seront-ils linéaires, clignotants[72] ou, plus probablement systémiques, et donc impossibles à anticiper ? Il faut se rappeler que la connaissance des interactions d’un système sont largement inconnues avant qu’elles ne surviennent.

Une dernière difficulté provient du fait que les impacts d’un effondrement auront un impact différent selon les régions affectées.

En somme, voilà bien le paradoxe des discours de l’effondrement : on arrive suffisamment a s’y projeter et entrevoir concrètement ce qu’il pourrait signifier, mais il faut « renoncer à une vision homogène des choses »[73] . Ce qui veut dire que si l’effondrement est quasi-certain parce que tout indique qu’il ne paraît pas possible qu’il en soit autrement[74] , il reste grevé d’une grande incertitude quant aux temps et aux détails des événements ! Ce paradoxe, ou plutôt cette incapacité du discours à envisager totalement la réalité est le signe que les discours de « l’effondrement » ont une fonction métaphorique au sens auquel Paul RICOEUR l’entend. Non pas une sympathique figure de style perdue au milieu d’un joli poème, mais un récit de fiction qui, pour n’être pas descriptif, n’est pas sans référence au monde « réel »:

une métaphore est une opération sémantique par laquelle les deux termes en présence [....] prennent un sens nouveau.[75]

et

La métaphoricité consiste [...] à décrire un domaine moins connu – la réalité humaine – en fonction des relations d’un domaine fictif – la fable tragique – en usant de toutes les vertus de « déployabilité systématique » contenues dans cette fable. [76]

C’est bien cela que font SERVIGNE et STEVENS et tous les collapsologues : ils racontent des effondrements qui ont pour effet de nous faire « voir autrement la réalité que ces termes dénotent »[77] (c’est leur « déployabilité systématique ») et de nous construire des façons de nous y orienter et y agir (c’est la « réalité humaine » aux prises avec ces événements incertains). Pour autant, la métaphoricité des récits de l’effondrement ne nous verrouille pas dans une seule direction. Un signe de cette ouverture a l’action[78] plurielle consiste dans le fait que l’effondrement provoque des réactions variées : il y a des survivalistes, des « çavapétistes », des « aquoibonistes », des transitionneurs et les « collapsniks »[79].

La collapsologie, le nom que SERVIGNE et STEVENS donnent avec autodérision à leur discours[80] , permet de voir le monde ainsi : non plus comme un objet posé là et à notre disposition pour l’exploiter a notre guise, mais comme un système vivant qui nous porte et dont nous sommes partie intégrante. Ses éléments nous affectent et notre présence a des effets sur lui[81] . Plus précisément, la collapsologie oblige a une rupture radicale avec les récits du progrès et de l’optimisme technologique. Face aux limites réelles qui constituent le monde, il faut se projeter autrement dans l’avenir. Il n’est pas besoin de savoir exactement quoi et comment cela va s’effondrer pour agir de façon a s’adapter. La perspective elle-même des effets irrémédiables du franchissement des limites nous place dans une autre dynamique que celle de l’accroissement.

Voilà pourquoi, SERVIGNE et STEVENS ont donné, avec G. CHAPELLE, une suite a leur livre. Il s’appelle Une autre fin du monde est possible, et porte comme sous-titre, Vivre l’effondrement et pas seulement y survivre[82] , dans lequel ils déploient les différents aspects de la métaphore de l’effondrement dans les registres des représentations (il faut raconter d’autres histoires que Mad Max ou Le Jour d’après) [83] , de la spiritualité (réconcilier les religions et spiritualités entre elles), des relations entre les sexes, de la psychologie et de l’entr’aide[84] . Ils nomment celles et ceux qui travaillent et se laissent travailler par cette métaphore, les « collapsonautes » et incitent à la

« collapsosophie ». Au fond, il ne s’agit de rien de moins que de se préparer a quitter notre civilisation thermo-industrielle pour autre chose. Le passage sera ce que nous en ferons : « apocalypse ou happy collapse ? »

Après ce tour d’horizon rapide de la collapsologie, revenons a la question de départ : collapsologie et Apocalypse, quels rapports ?

Le retour de la fin.

On l’a vu, des études scientifiques toujours plus nombreuses montrent la non-durabilité du monde tel que nous le connaissons, car les atteintes que les activités humaines infligent au système-Terre sont telles que la possibilité de la disparition de la vie humaine n’est pas une chimère. Voilà qui nous met devant la possibilité concrète d’une fin du monde. Cela est une nouveauté : depuis l’essor de la rationalité moderne et ses combats pour se libérer des tutelles de la pensée religieuse, l’idée de la fin du monde a été jetée dans les poubelles de l’histoire. Or la revoilà. Qu’elle ne soit pas connotée religieusement ne la rend que plus aigüe : la fin possible impose son agenda de questions.

La question des communs d’abord puisque ce sont le climat, les conditions de la vie qui sont menacées. L’air, l’eau, la terre, les poissons, la nourriture sont les biens de tous, humains et non­humains, car s’ils viennent a manquer, c’en est fait de leur vie a tous. De fait, la santé du système­Terre est garante de la vie, quelles que soient nos opinions philosophico-religieuses ou politiques, et nos nationalités. Ce que le pape François appelle « notre maison commune »[88] recouvre exactement cela. La globalité de la menace et qu’elle soit induite par les activités humaines implique que nous réfléchissions en commun à ces biens. On le sait, les humains sont capables de collaborer, c’est ainsi qu’ils sont forts[89] et qu’ils ont construit des empires. Mais justement : la logique d’empire est une logique d’uniformisation et de soumission des imaginaires, comme l’illustre assez bien le récit biblique de la tour de Babel[90] . La fin possible du monde en son entier pose à nouveaux frais la question politique en excluant d’emblée la version monolithique, « impérialiste » et donc particulariste de la réponse. Si la démocratisation, la culture du dialogue politique et diplomatique sont des avancées auxquelles la modernité est attachée ont une grande valeur, elles ne sont pas encore venues a bout des divisions induites par la tentation du pouvoir a grande échelle. Il s’agit non plus de défendre les particularités, le pouvoir et la « zone d’influence » de chacun seulement, mais encore d’instituer des mécanismes qui garantissent à tous la satisfaction des besoins en assurant les capacités de renouvellement naturel des ressources, à toutes les échelles : internationale, continentale, nationale, locale[91] . Large programme dans lequel nous balbutions encore. Pourtant mal en point, notre monde n’est pas encore complètement brisé, mais inaccompli, a l’image de ce que la poétesse étatsunienne Amanda GORMAN a dit de son pays récemment[92] .

Ce retour de la fin possible se manifeste encore dans un autre sens du mot fin. Il s’agit de la question de la finalité de la civilisation. Que voulons-nous, et pourquoi, et à quel prix ? Nous n’avons pas attendu les discours collapsologiques pour nos poser cette question , mais elle prend une urgence nouvelle. Si, au début de l’ère industrielle et technologique, le désir de prémunir l’humanité des famines, des maladies, des rigueurs du climat, de s’enrichir pour sortir de la pauvreté et contribuer a la liberté individuelle allait de soi, aujourd’hui c’est plus compliqué. Ces progrès ont été réalisés pour une grande part des humains, mais au prix des menaces que l’on sait. De plus, ces progrès n’ont pas réduit la différence entre riches et pauvres, mais l’a plutôt creusée, même là oi les conditions sont les meilleures. La fin visée par nos prédécesseurs est noble et il faut la poursuivre. Mais comment élever le niveau des plus pauvres en suivant les mêmes recettes que jusqu’à présent sans aggraver encore la dégradation de la Terre ? Il y a là une impasse. Faut-il renoncer à ces nobles fins ? Renoncer à l’exigence de justice et de bien-être pour tous ?

Un dernier aspect de la fin du monde comporte la question des limites. Les discours collapsologiques nous mettent devant le fait incontournable que le système-Terre n’est pas inépuisable. Là encore, nous le savions. Mais pressés de nous débarrasser de toutes les mythologies et de toutes les sagesses ancestrales, religieuses ou non, étonnés et émerveillés par nos capacités fantastiques, nous avons cru que tout était infini, mais sans plus nous en effrayer[93] , charmés par l’idée que nous pourrions gérer tout cela. Dans ce contexte de perte du sens des limites, ce que dit Dieu dans la Genèse[94] à l’attention de l’homme et de la femme : « Remplissez la terre et dominez-là » , peut encore aggraver l’insensibilité aux limites[95] : la religion devient garante idéologique des modes de vie. L’urgence de la situation, tout comme la réalité de la constitution psychologique[96] de l’être humain réclament qu’il y a tout un travail à faire pour investir positivement la notion de limite. C’est tout un imaginaire à reconstruire, des éducations à élaborer.

La fin possible du monde, en somme, pose les questions éthiques des valeurs et de la justice, à la hauteur de l’urgence et de la globalité des menaces. C’est nouveau, même si l’on considère que l’alarme a été actionnée voilà un demi-siècle déjà, car les atteintes n’ont pas cessé depuis et que la marge restante pour corriger le cap est toujours plus petite. Le moment risque d’arriver oi il sera trop tard pour l’humanité, alors qu’il est déjà trop tard pour les espèces disparues depuis, qu’il est déjà trop tard pour éviter le réchauffement climatique, vu qu’on ne parle que de tentatives de le limiter.

Ce retour de la fin du monde résonne aux oreilles chrétiennes avec l’Apocalypse de Jean, sans aucun doute, malgré le fait que le livre biblique ne se veuille pas annonce du déroulement futur des événements historiques, mais révélation de ce qui se tient au cœur de l’histoire, comme nous l’avons vu plus haut. Il faudrait dire révélation de Celui qui se tient au cœur de l’histoire : pour la foi chrétienne la présence de Dieu dans le monde se trouve là oi souffrent ses témoins mis à l’épreuve par les persécutions et le tragique de l’existence, dans la perspective de la victoire finale sur le mal. Il vient « bientôt ~ signifie qu’il est toujours devant, jamais à disposition ni acquis. En termes plus philosophiques, toujours imminent[97] . C’est dire que la présence de Dieu n’est pas d’abord une consolation pour sortir et guérir de l’épreuve[98] , mais bel et bien une promesse et une exhortation. Une promesse en ce que la foi s’éprouve au cœur de l’existence comme reconnaissance d’un « courage d’être »[99] toujours renouvelé et de forces reçues au sein d’une communauté ; une exhortation en ce qu’il y a au cœur de la foi une exigence de cohérence entre ce qui est professé et la manière de vivre en relation avec tout. Existence a l’image du Galiléen, partageant et disposé a apprendre[100] , puis crucifié, ne retournant pas contre autrui le mal infligé.

Si le langage dont il vient d’être fait usage fleure bon la sacristie pour des narines sensibles, il vaut néanmoins la peine de réfléchir à sa pertinence existentielle ou psychologique, à sa fécondité, sans y mêler ce qui est largement – mais à tort – tenu pour être « la foi »[101] , c’est-à-dire un savoir moindre. Dans ce registre, le récit de l’Apocalypse dresse du monde ce tableau : il est le lieu où le mal et ses affidés déploient leurs artifices pour tromper. Personnifier le mal incite à penser que l’humain n’est pas l’origine du mal[102] , même si ses actions le propagent et l’augmentent la plupart du temps. Chacun et chacune fait l’expérience d’un mal toujours surgissant et surprenant. Parler de tromperie et de séduction fait voir le risque de la facilité : aux prises avec l’absurde et le non-sens, la douleur et les pertes qui ne cessent jamais, l’enjeu pour les humains est de ne pas sombrer volontairement dans le chaos, la violence et la rancœur, même s’il faut payer pour cela le prix de sa vie[103] . Mais c’est difficile : il y faut de la patience, de la persévérance. C’est que l’Apocalypse renvoie les lecteurs dans leur monde, en dehors du texte, car là se trouve l’enjeu de l’existence. Malgré le mal, il s’agit de faire – avec les autres – que la vie soit possible pour tous les êtres vivants et pour soi-même dans la « maison commune » ; il s’agit de résister à la tentation de la violence facile[104] ou démesurément ambitieuse (éradiquer le mal et construire un monde rêvé).

Voilà qui renverse la perspective traditionnelle que le thème de la fin des temps faisait porter sur le monde. Puisqu’il était destiné a disparaître au profit d’une « terre nouvelle », les chrétiens en ont souvent prôné le mépris et manifesté du pessimisme a son égard, quand ce n’était pas de l’hostilité. La menace d’une fin possible qui n’est pas le fait de Dieu mais le résultat des actes irresponsables de l’humanité, fait aussi voir le monde comme précieux, fragile et indispensable. « L’horizontal a désormais préséance sur la dimension verticale », dit Bruno LATOUR[105] . C’est que le primat accordé aux Idées (Platon !), au spirituel, à la vérité divine, bref, aux « choses d’en-haut »[106] a conduit a l’oubli de la réalité et de la chair, ce qui a persisté jusque dans la prise de distance d’avec la pensée religieuse. Le retour de la fin oblige à

empêcher la fin du temps, plonger dans les réalités d’en-bas, s’immerger et non pas s’émanciper, apprendre a dépendre [107].

Un problème insoluble

Un autre aspect du discours collapsologique fait écho au livre de l’Apocalypse, et il est relié à ce que nous disions plus haut de la complexité des problèmes. C’est que, comme une pelote de laine, toutes les facettes de la situation sont étroitement imbriquées, sans que nous puissions en maîtriser tous les tenants et aboutissants. Il ne s’agit plus de dire que nous aurions quelques problèmes importants et urgents auxquels il faut juste trouver les bonnes solutions, mais que nous sommes dans une situation inextricable. Un peu comme une maladie incurable : on ne s’en sortira pas, mais on doit aménager son existence pour vivre avec. A ce stade, « la collapsologie ne suffit plus », comme disent SERVIGNE, STEVENS et CHAPELLE[108] : donner le diagnostic au malade n’est que la première étape, et cela ne dit pas encore quoi faire. Les traitements proposés ne visent qu’à aider a vivre avec. De là, il y a deux chemins à prendre, qui ne s’opposent pas. Techniquement, « extérieurement », il y a des solutions provisoires, locales, comme le développement des permacultures à grande ou petite échelle, il y a la recherche sur les énergies renouvelables et leurs applications, la recherche de financements pour aider à la « transition énergétique ~, c’est-à-dire à la sortie des énergies fossiles. Tout cela est bel et bon, mais butte sur deux obstacles. Le premier c’est que les nouvelles technologies apportent elles aussi leurs problèmes spécifiques[109] , le second a trait à la gouvernance : pour être à la hauteur de la situation, il y faut un regard à long terme et que tous les décideurs jouent le même jeu sans tricher[110] . Voilà pour la voie extérieure.

Il y a aussi la voie « intérieure » : en effet, constater la complexité et l’inextricabilité de la situation est frustrant, peut amener à la dépression, la colère, le repli, le découragement et le cynisme désespéré. « Si nous nous enfermons et si nous abordons l’avenir sans compassion, nous risquons d’y perdre des raisons de vivre ainsi que notre humanité. » disent SERVIGNE, STEVENS et CHAPELLE[111] . Pour cela, il faut mobiliser toutes les ressources possibles : ce qu’on appelait jadis la « force d’âme ».

Cela fait écho à l’Apocalypse car dans ce livre, Dieu seul vient a bout du mal, a la fin. Nous l’avons vu plus haut, la question du mal et de son étendue dépasse –de loin – l’être humain : il n’en est ni l’origine ni capable d’en venir a bout. Il ne s’agit pas ici de présenter « Dieu » comme la seule issue possible a tous nos maux, comme le Père Noël, mais plutôt de voir que l’espérance d’une fin du chaos pour une terre nouvelle libère du désir d’en finir pour apprendre à vivre dans le temps sans perdre courage. Existentiellement, laisser à Dieu le mot de la fin revient à laisser tomber la volonté de tout régler pour enfin faire face a ce qui nous attend ici, dans l’en-bas, sans rien en attendre. C’est plutôt paradoxal : agir sans rien en attendre, mais agir selon ce qui est attendu. Ce paradoxe de l’espérance chrétienne, encore une fois, est fécond, parce qu’il est humain, tout simplement et profondément. Ce que SERVIGNE, STEVENS et CHAPELLE nomment, à la suite de Joanna MACY et Chris JOHNSTONE, « l’espérance en mouvement »[112] en donnant l’exemple suivant :

L’espoir passif se résume par « j’ai l’espoir de la voir revenir », ce a quoi l’espoir actif lui répond : « alors va la chercher ! »[113].

Attendre et espérer ce n’est donc pas se croiser les bras, mais mobiliser tout son être pour anticiper déjà ce qui vient. La collapsologie attend, anticipe les temps difficiles durant lesquels il vaudra mieux s’entraider que lutter les uns contre les autres pour la vie ; elle cherche à en minimiser les effets en appelant a changer déjà de manière de penser et d’être dans le monde. La foi chrétienne selon l’Apocalypse attend un monde nouveau, mais pas sans avoir affronté des épreuves et succombé durant des temps difficiles, tout en appelant a changer déjà de manière d’être et de penser.

Ainsi donc, si la constatation de l’inextricabilité de la situation – de l’incurabilité de la « maladie » du système-Terre – comporte le risque de la dépression et du découragement ; si l’attente chrétienne de la victoire sur le mal comporte celui de la paresse et du cynisme, les remèdes à appliquer sont les mêmes : changer maintenant en développant tant notre agir informé que nos ressources intérieures. Les deux vont de pair : l’illusion de ces derniers siècles fut certainement de tout miser sur l’agir vers l’extérieur et transformateur dans le monde[114] , ce qui nous a conduit dans la situation présente.

Jonas.

Une dernière chose. Les collapsologues me font penser, à la suite de Jean-Pierre DUPUY[115] , au prophète Jonas. En effet, ce dernier est envoyé à Ninive pour faire savoir à ses habitants que Dieu a décidé par devers-lui de la détruire : « encore quarante jours et Ninive sera mise sens dessus­dessous ! » [116] . De même, les collapsologues annoncent que la fin de notre civilisation et du monde tel que nous le connaissons est proche et certaine. Dans les deux cas, la situation est délicate : Dieu a arrêté la destruction de la ville, mais tout lecteur de la Bible sait que Dieu change d’avis tout le temps en fonction des actions humaines ![117] L’effondrement va arriver, mais tout le monde sait que l’avenir est incertain et que tout n’est pas joué encore.

Mais Dieu change d’avis, Jonas a donc annoncé la destruction pour rien, lui qui s’en réjouissait a l’avance en s’installant sur une colline au loin pour profiter du spectacle ! A quoi servent donc les prophètes ? A cela justement : faire que ça change. Or, Jonas comme les collapsologues, bien qu’ils portent des nouvelles désagréables, sont pris dans un cul-de-sac : s’ils croient trop fort a ce qu’ils disent, ils sont moqués comme faux prophètes quand leurs annonces ne se vérifient pas et s’ils n’y croient pas, ils n’avertiront jamais personne et rien ne changera jamais.

Voilà à quoi devrait ressembler la prophétie face à une catastrophe anticipée mais dont la date est inconnue : le malheur ne devrait y figurer qu’en filigrane d’une annonce de bonheur, ce bonheur consistant en l’évitement du malheur. On pourrait dire que le bonheur contient le malheur tout en étant son contraire, en prenant le verbe contenir dans son double sens d’avoir en soi et de faire barrage à[118] .

Pourrons-nous faire barrage a l’effondrement ? Pour cela il faut probablement être persuadés que la vie vaut la peine d’être vécue et partagée, même sans confort. Et que la catastrophe est imminente si rien ne change. Un chien vivant vaut mieux qu’un lion mort.

[1](retour) P. SERVIGNE, R. STEVENS, Comment tout peut s’effondrer, Petit manuel de collapsologie a l’usage des générations présentes, coll. Anthropocène, Editions du Seuil, Paris, 2015.

[2](retour) Id., p. ex. p. 91, 129, etc.

[3](retour) Dennis MEADOWS, Donella MEADOWS, Jorgen RANDERS, Les limites à la croissance (dans un monde fini), Le rapport Meadows, 30 ans après, (traduction française de Agnès El Kaïm), coll. L’écopoche, Editions Rue de l’Echiquier, Paris, 2017.

[4](retour) J. MOLTMANN, Dieu dans la création, Traité écologique de la création, coll. Cogitatio fidei, no 146, Paris, Cerf, 1988. (Gott in der Schöpfung, Ökologische Schöpfungslehre, München, Chr. Kaiser, 1985).

[5](retour) P. GISEL, La création, Essai sur la liberté et la nécessité, l’histoire et la loi, l’homme, le mal et Dieu, Collection Lieux théologiques, Genève, Labor et Fides, 1980.

[6](retour) P. GISEL, Op. cit., p. 177.

[7](retour) Mais aussi a l’écoute : voir sur Youtube, la chaîne Thinkerview : Effondrement de la civilisation ? Pablo Servigne. Diffusé le 23 février 2019, consulté dernièrement le 9 janvier 2021.

[8](retour) Olivier ABEL, Le Bouleversement éthique des horizons, in O. ABEL, E. BARD et allii, Ethique et changement climatique, Collection Essais et documents, Editions Le Pommier, Paris, 2009. Aussi : olivierabel.fr/ecologie­politique.php, consulté le 10 janvier 2021.

[9](retour) Ce règne de mille ans durant lesquels Satan est enchaîné se trouve au chapitre 20 du livre. Il a donné lieu à de nombreuses interprétations, mais c’est en Occident seulement qu’il a provoqué des mouvements politiques d’insurrection. Cf. : A. PAUL, « Le temps de l’existence et le sens de l’histoire dans l’Apocalypse de Jean ». Centre Sèvres, Recherches de sciences religieuses, vol 108, 2020, p. 82.

[10](retour) Ch. NIHAN, « Apocalypses juives », in Th. RÖMER, J. - D. MACCHI, C. NIHAN (éds.), Introduction a l’Ancien Testament, Le Monde de la bible, n° 49, Labor et Fides, Genève, 2009, p. 662.

[11](retour) Envoyé, en grec, c’est « ange ».

[12](retour) L’article C. NIHAN présente une très bonne introduction a la question. Id., p. 661-693. Je m’y réfère largement.

[13](retour) L’idéal de la fin de vie du juste : « Abraham expira ; il mourut dans une heureuse vieillesse, âgé et rassasié de jours ». Gn. 25. 8. « L’ordre de la création manifeste continuellement la volonté du Dieu créateur : par conséquent, c’est en observant et en respectant les principales structures de la nature et de la société que l’homme peut apprendre a connaitre Dieu et a obéir a sa volonté ». NIHAN, op. cit. p. 685.

[14](retour) NIHAN, op. cit. p. 687.

[15](retour) Pour la Palestine, la question est traitée par S. C. MIMOUNI, Le judaïsme ancien, du IVè siècle avant notre ère au IIIè siècle de notre ère : des prêtres aux rabbins. Coll. Nouvelle Clio, PUF, Paris, 2012, p. 279 - 412.

[16](retour) MIMOUNI, op. cit. p. 307.

[17](retour) Idem, p. 313-351

[18](retour) En effet, la bible hébraïque fut traduite en grec en l’an 270 av. notre ère par des savants juifs a la demande du roi Ptolémée II. Témoin de ce que le judaïsme n’était pas monolithique et qu’il y avait des scribes érudits imprégnés de culture grecque. Et étrangère aussi : les apocalypses juives témoignent d’une bonne connaissance de la littérature de révélation égyptienne, iranienne et mésopotamienne. Là-dessus, cf. NIHAN, Op. cit., p. 691.

[19](retour) « Sur le thème de l’apocalyptique chrétienne primitive », in E. KÄSEMANN, Essais exégétiques, Le monde de la bible, Delachaux et Niestlé, Neuchâtel, 1972, p. 199 - 226.

[20](retour) Ce que montrent des textes comme Mc 13. 1 – 13 et parallèles, ou 1 Thess. 4. 13-18, par exemple. Et le thème de la résurrection, central pour le christianisme, en provient directement.

[21](retour) Notamment autour du règne terrestre pacifique du Christ d’une durée de mille ans (Ap. 20). Là-dessus, cf. A. PAUL, op. cit., p. 84ss.

[22](retour) Contrairement à Jean-Baptiste qui situe son ministère dans la perspective de « la colère qui vient », Jésus annonce un salut joyeux sous la forme du Royaume de Dieu « qui est proche ». cf. D. MARGUERAT, Vie et destin de Jésus de Nazareth, Seuil, 2019, p. 95-96.

[23](retour) C. THEOBALD, Le christianisme comme style, Une manière de faire de la théologie en postmodernité, Cerf, Paris, 2008, p. 607.

[24](retour) Il ne faut pas voir ce choix avec des lunettes marxistes comme l’expression d’un rapport dominant / dominés. Au contraire, l’établissement de la liste de livres considérés comme « saints » est un processus long, qui témoigne que les autorités ont avalisé des livres qui étaient déjà majoritairement utilisés par les communautés. Voir E. KÄSEMANN, Das Neue Testament als Kanon, Vandehoeck et Ruprecht, Göttingen, 1970.

[25](retour) Ap. 1.1.

[26](retour) Ap. 22.20.

[27](retour) Ap. 20

[28](retour) Ap. 21. 3

[29](retour) Voir Ap. 4. 1-11 ; 7. 9-17 ; 11. 15-19 ; 14. 1-5 ; 19 1-10

[30](retour) A. PAUL, op. cit. p. 81

[31](retour) Id.

[32](retour) A. PAUL, op. cit., p. 82.

[33](retour) Voir Ap. 1. 9 ; 2. 2 ; 6. 10-11 ; 7. 14 ; 14. 12 ; par exemple

[34](retour) Ap. 20. 7-15 .

[35](retour) Ap. 20. 13.

[36](retour) Je rapproche cela de l’interprétation de Mt. 25. 31-46 faite dans C. FOCANT, D. MARGUERAT (dir.), Le Nouveau Testament commenté, Bayard, Labor et Fides, Paris et Genève, 2012, ad. loc.

[37](retour) Voir Ac. 1.7 : « vous n’avez pas a connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa propre autorité, mais vous allez recevoir une puissance, celle du Saint Esprit qui viendra sur vous. Vous serez alors mes témoins a Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre », fait dire l’évangéliste Luc a Jésus. On ne saurait mieux dire que toute tentative de prédire l’avenir est vaine, même en triturant des versets bibliques. Seule compte la fidélité au Christ, en actes et en paroles.

[38](retour) P. SERVIGNE, op. cit., p. 91.

[39](retour) Op. cit., p. 19.

[40](retour) Id., p. 20.

[41](retour) Id., chapitre 3. p. 65-92.

[42](retour) Id., p. 76-84.

[43](retour) SERVIGNE et STEVENS parlent de limites infranchissables comme les réserves de matières premières, et de limites franchissables, comme les ressources halieutiques, par exemple. Dans le premier cas, on ne peut pas brûler plus de pétrole qu’il y en a dans les sols ; dans le second, on peut pêcher plus de poissons que constitue la quantité minimale nécessaire pour que leur population reste stable. Ce faisant, on met le système en grand danger. Pour la biodiversité et pour nous.

[44](retour) Id., p. 41.

[45](retour) Un pic « désigne le moment oü le débit d’extraction d’une ressource atteint un plafond avant de décliner inexorablement ». Id., p. 42 et 43.

[46](retour) Là-dessus, Id., p. 52-63. Le système économique et financier dépend fortement des énergies fossiles, comme le démontrent SERVIGNE et STEVENS, mais il comporte lui-même des risques propres à déstabiliser le monde, comme on l’a vu pendant et après la fameuse crise des subprimes. Voir l’excellent G. GIRAUD, Illusion financière, De la crise des subprimes a la transition écologique, Editions de l’atelier, Ivry-sur-Seine, 2014.[2](retour)

[47](retour) Id., p. 66-76.

[48](retour) Id., p 75. Avant d’en arriver là, des études tendent a montrer que, si la température augmente au-delà d’un certain point, les océans perdraient leur oxygène au point de laisser proliférer des bactéries produisant de l’hydrogène sulfuré, irrespirable et mortel. C’est ce qu’on appelle les « océans de Canfield ~, d’après une étude publiée par lui dans la revue Nature en 1998. On peut la trouver en format PDF sur internet en recherchant « Modèle de Canfield » sur Wikipédia. Consulté le 1er févier 2021.

[49](retour) Id., p. 128.

[50](retour) Voir plus haut, page ......, note ~.

[51](retour) Id., p. 29.

[52](retour) Par exemple, il est prouvé que, par rapport au début de l’ère industrielle, la population des grands poissons a chuté de 90%. De plus, la disparition d’une espèce a des effets négatifs « en cascade » sur les autres espèces et sur l’écosystème dans lequel elle vivait. Cf. Id., p. 80 et 79.

[53](retour) Moi-même je peine à changer quoi que ce soit dans mon mode de vie. Maison, voiture, nourriture, habillement, travail, loisirs, je vis « hors-sol », sans lien concret avec le milieu terrien dans lequel je vis : les supermarchés sont tous les mêmes, les transports publics aussi. Même les agriculteurs autour de moi sont des entrepreneurs industriels. Il se trouve juste que leur travail a à voir avec la terre, mais ils vont aussi au centre commercial pour beaucoup de produits essentiels.

[54](retour) Cf. le second précepte de la méthode de DESCARTES : « ...diviser chacune des difficultés que j’examinerais en autant de parcelles qu’il se pourrait, et qu’il serait requis pour les mieux résoudre. » DESCARTES, Discours de ía méthode, 2ème partie, 203-205.

[55](retour) L’idée qu’il suffit de savoir et de vouloir pour changer est l’effet d’une illusion proprement moderne : le monde et nous-mêmes serions des machines auxquelles appliquer un savoir selon un savoir-faire. Y manquer serait un défaut de savoir, une incapacitéconnaître ou alors de la méchanceté. C’est la logique des procès staliniens : quiconque ne reconnaît pas la vérité du Parti est ignorant, fou ou faible d’esprit ou alors habité de mauvaises intentions. Voilà pourquoi les modernes sont d’autant plus moralistes qu’ils se disent rationnels.

[56](retour) Y. COCHET, « Postface », in SERVIGNE & STEVENS, Op. cit., p. 262.

[57](retour) L’Apocalypse de Jean, soit dit en passant, arrive à faire entrevoir un monde à venir irreprésentable, puisque totalement nouveau, mais que l’on peut déjà goûter et éprouver au cœur des tourments de ce monde-ci. Il est donc possible, sans se le représenter, de s’y projeter par le moyen de l’action ici et maintenant. C’est pas mal, quand même !

[58](retour) Là-dessus, voir la postface éclairante d’Yves COCHET au livre de SERVIGNE et STEVENS, Id., p.261-268.

[59](retour) COCHET, id., p. 264. C’est le classique : « je ne vois pas pourquoi je changerais, vu que les autres ne le font pas ! »

[60](retour) SERVIGNE et STEVENS, Op. cit., p. 95 ss.

[61](retour) Par contre, un système compliqué est entièrement connaissable et prévisible : un avion est très compliqué, mais on peut savoir exactement ce qui va arriver et ce qu’il faut faire si tel ou tel élément ne fonctionne plus ou manque. La complication se prête très bienl’analyse, au second précepte de la méthode de DESCARTES citée plus haut. Maintenant, mettez un avion compliqué (même sans panne technique) dans un environnement météorologique, aéronautique et humain en mouvement constant, vous avez un système complexe nécessitant, pour y voir clair, une véritable culture de la saisie des situations, de la prise de décision en milieu incertain et de l’analyse d’erreurs sans esprit de punition. Cf. Chr. MOREL, Les décisions absurdes, vol I et II, coll. Folio, Gallimard, Paris, 2004 et 2012.

[62](retour) Cf. le dictionnaire classique de GAFFIOT sous l’entrée « collabor ».

[63](retour) Op., cit. p.15. Définition de Y. COCHET, in « L’effondrement, catabolique ou catastrophique ? », Institut Momentum, Séminaire du 27 mai 2011. Consulté sur www.institutmomentum.org le 1er février 2021.

[64](retour) Voir sa critique par SERVIGNE et STEVENS, Op. cit., p. 15-18.

[65](retour) SERVIGNE ET STEVENS, Op. cit., p. 17-18

[66](retour) Idem. Notons que l’Anthropocène est la période de l’histoire durant laquelle les changements profonds sur le système terre sont les effets des activités humaines. Le terme est controversé dans la communauté scientifique, certains lui préférant celui de Nouveau Régime Climatique. Cf. B. LATOUR, « Sur une nette inversion du schème de la fin des temps », in RSR, Centre Sèvres, Paris, tome 107, 2019/4, p. 606.

[67](retour) SERVIGNE et STEVENS, Op. cit., p. 167-173. Le modèle informatique avec lequel le rapport Meadows avait forgé ses scénarii en 1972 a montré une croissance exponentielle en tous les domaines (démographie, consommation, pollution, etc..) avant un pic et le début de la descente au milieu du XXIème siècle. Même dans les scénarii « optimistes » durant lesquels les humains agissent et adaptent leurs comportements à la situation, le niveau de vie baisse aussi, mais volontairement. C’est que les limites du système ne changent pas. Cf. MEADOWS, Les limites à la croissance, p. 223 et suivantes. Mais ces modèles ne décrivent pas l’avenir, ils tracent des tendances.

[68](retour) Ce qui serait céder encore aux sirènes des représentations mécanistes.

[69](retour) SERVIGNE et STEVENS, Op. cit., p. 187-191.

[70](retour) SERVIGNE et STEVENS, Op. Cit., p. 190.

[71](retour) Id., p. 198 : citant un article de M. DEREX (& allii) paru dans la revue NATURE, vol. 503, n°7476, 2013, p. 389- 391 : « plus nous dépendons de grands pans de connaissances pour notre survie, plus nous avons besoin de vivre en grands groupes ».

[72](retour) Ou « oscillants ~, c’est-à-dire selon une suite de récessions et de reprises dont la tendance globale est déclinante. Cf. Id., p. 192.

[73](retour) Id., p.215.

[74](retour) Cf. plus haut note....

[75](retour) J.-M. TETAZ, « La redécouverte du Juif Jésus et le problème de la christologie », in D. COHEN-LEVINAS & allii, Une Passion après Auschwitz ? Autour de la Passion selon Marc de Michaël Levinas, (dir. J.-M. TETAZ, P. GISEL), Beauchesne, Paris, 2017, p. 184.

[76](retour) P. RICOEUR, La métaphore vive, Seuil, Paris, 1975, p. 308.

[77](retour) Idem.

[78](retour) Autre aspect abordé par RICOEUR dans son œuvre.

[79](retour) Sur ces termes, voir SERVIGNE et STEVENS, Op. cit., p. 228-230.

[80](retour) Id., p. 20.

[81](retour) Ce que cherche à souligner le terme « d’Anthropocène ».

[82](retour) Coll. Anthropocène, Seuil, Paris, 2018.

[83](retour) Un roman particulièrement remarquable sur une époque post-effondrement est celui de STARHAWK, The Fifth Saycred Thing, Bantam Books, New York, 1993.

[84](retour) P. SERVIGNE & G. CHAPELLE, L’entraide, l’autre loi de la jungle, Paris, Les liens qui libèrent, 2019.

[85](retour) SERVIGNE, STEVENS, CHAPELLE, Op. cit.

[86](retour) Idem, p. 267.

[87](retour) cf. G. GIRAUD, «Vers une économie politique des communs », CITES, PUF, n° 76, 2018 /4, p. 81-94.

[88](retour) Pape François, Lettre encyclique Laudato si sur la sauvegarde de la maison commune, Paris, Artège, 2015.

[89](retour) Y.N. HARARI, Sapiens, une brève histoire de l’humanité, Paris, Albin Michel, 2015.

[90](retour) Gn. 11. 1-9. La compréhension qula tradition juive de ce récit en fait le paradigme des régimes visant« installer dans le monde l’universel anonyme et impersonnel, valable pour tous, et ne respectant en aucune façon la différence de chacun ». A. ABECASSIS, La pensée juive, Tome 1. Du désert au désir, coll. Le livre de poche, Biblio essais, Paris, 1987, p. 326-327.

[91](retour) “Parler de Bien Commun sans parler des rituels constructeurs de communs, c’est parler dans le vide ». B. LATOUR, art. cit., p. 613.

[92](retour) “Somehow we’ve weathered and witnessed a nation that isn’t broken but simply unfinished.”Poème “The Hill we climb”. Accessible en traduction approximative sur le site www.lyricstranslate.com.

[93](retour) « Quand je considère la petite durée de ma vie absorbée dans l’éternité précédente et suivante [...], le petit espace que je remplis et même que je vois abimé dans l’infinie immensité des espaces que j’ignore et qui m’ignorent, je m’effraie et m’étonne de me voir ici plutôt que là, car il n’y a point de raison pourqoui ici plut’ot que là, pourquoi à présent plutôt que lors. » PASCAL, Fragment Misère n°17/24, consulté le 10 février 2021 sur www.penseesdepascal.fr.

[94](retour) Gn. 1. 28

[95](retour) Le sens du texte n’est donc pas donné entièrement par le contexte de production lui-même, mais encore par le contexte de réception, ignoré très souvent du lecteur lui-même. La prééminence de l’un sur l’autre doit pas se décider seulement selon le critère de l’antériorité historique. Car celle-ci n’est que l’avatar moderne et laïque d’une perspective croyante qualifiant le texte d’inspiré. De plus, la conception moderne de la primauté et de l’autorité entendues comme fondement rationnel desquels tout découle ne fait pas justice à ce que la tradition entendait par ces mots. Il faut d’autres règles. Par exemple celle qui prend en compte ce que l’auteur fait avec le contexte dans son texte (quand on arrive à le connaître...), et ce que les lecteurs suivants ont compris et comment ils ont fait jouer le texte dans le leur. Sans oublier que tout ceci se passe dans les formes du langage. Là-encore, RICOEUR mérite le détour...

[96](retour) Cf. J. PETERSON, 12 Règles pour une vie, un antidote au chaos, Paris, J’ai lu, 2019, p. 180-220.

[97](retour) P. RICOEUR, Temps et récit, Tome 2., p. 47.

[98](retour) Même si d’innombrables existences en témoignent et qu’il soit possible d’en faire un chemin de vie. Voir par exemple, parmi une foule d’autres auteurs : Anselm GRÜN, Petit manuel de la guérison intérieure, Paris, Albin Michel, 2001.

[99](retour) Selon le titre du livre excellent de Paul TILLICH, Le courage d’être, coll., Christianisme en mouvement, Casterman, 1967, (traduction de l’anglais par Fernand Chapey. Livre publié en 1952 par Yale University Press, New Haven, USA).

[100](retour) Chr. THEOBALD, Le Christianisme comme style, une manière de faire de la théologie en postmodernité, Tome 1, coll. Cogitatio Fidei, Paris, Cerf, 2007, p. 61 et, plus généralement les pages 59-136, qui en sont comme le cœurmon sens.

[101](retour) Pour avoir le goût de cette fécondité envisagée dans le registre philosophique, on consultera avec intérêt le petit livre de François JULLIEN, Ressources du christianisme, mais sans y entrer par la foi, Paris, l’Herne, 2018.

[102](retour) L’Apocalypse fait ainsi écho au texte de la Genèse qui fait de la figure du serpent la présence du chaos au cœur du jardin : « Quand bien même l’homme est coupable et « commence >' réellement le mal [...], il n’en est pas moins, également, précédé par le mal et investi par lui » et « le mal est aussi de l’ordre du « déjà-là ; nul ne le commence absolument ». P. GISEL, La Création, Genève, Labor et Fides, 1980, p. 43

[103](retour) Ce n’est pas de l’héroïsme à tout prix : l’univers mental n’est pas ici celui du stoïcisme. Qu’on pense à Saint Augustin qui consacre un long passage d’un sermon à justifier le pardon pour ceux et celles qui, par peur pour leurs biens et leur vie ont renié la foi car il craignaient les sanctions visant ceux qui ne sacrifiaient pas aux dieux de Rome, et qui se sont rétractés par la suite. Cette question a divisé l’église au IVème siècle. Mais Augustin démontre une compréhension subtile et tendre de la complexité des situations dans lesquelles peuvent se trouver les êtres. St. AUGUSTIN, Sermon 296, § 14, in, Sur la chute de Rome, coll. Nouvelle Bibliothèque augustinienne, Paris, Institut d’études augustiniennes, 2004, p.87-91.

[104](retour) « Le meurtre est le trop habituel refuge de ces impuissantes nullités, travaillées par l’impatience et l’envie. ». F. DOSTOÏEVSKY, L’idiot, coll. Classiques Folio, Paris, Gallimard.

[105](retour) B. LATOUR, art. cit., p. 611.

[106](retour) Col. 3. 1.

[107](retour) B. LATOUR,. art. cit., p. 613.

[108](retour) Op. cit., p. 31-32.

[109](retour) Il est évident que l’énergie nucléaire est la moins polluante pour la planète, mais multiplier les centrales revient a multiplier les risques d’accident. Le secteur aéronautique est un bon exemple de cela : l’augmentation du trafic aérien, malgré l’amélioration des technologies a exigé, pour réduire encore les accidents, une formation spécifique des équipages à la gestion des problèmes. Et les accidents continuent de survenir, même si l’aviation est globalement sûre. Pourquoi en irait-il autrement du nucléaire ?

[110](retour) Là-dessus, voir O. ABEL, art. cit., p. 5.

[111](retour) Op. cit., p.33.

[118](retour) J.-P. DUPUY, art. cit.

[112](retour) Op. cit., p. 96.

[113](retour) Id.

[114](retour) Les églises en Occident aussi, autour des 16ème et 17ème siècles ont refoulé les mouvements mystiques et contemplatifs au profit de la mission et de l’action sociale. La querelle autour du « quiétisme » dans le catholicisme français en est emblématique.cf. S. H. DE FRANCESCHI, « Les querelles religieuses entre catholiques », in J.- C. PETIFILS (éd.), Le siècle de Louis XIV, coll. Tempus, Paris, Perrin, 2017, p. 293-310.

[115](retour) J.-P. DUPUY, Contre les collapsologues et les optimistes béats, réaffirmer le catastrophisme éclairé, sur https://aoc.media, consulté le 1er février 2021.

[116](retour) Jonas 3. 4.

[117](retour) « Je savais bien que tu es un Dieu bon et miséricordieux, lent à la colère et plein de bienveillance et qui revient sur sa décision de faire du mal ! » s’écrie Jonas, fâché de ce que Dieu ait été touché par le repentir des habitants de la ville et renoncé à la détruire (Jon. 4. 2). Peut-être le savait-il, mais c’est difficile de discuter les ordres de Dieu : s’il avait tenu ces propos avant de partir, que serait-il arrivé ? Les habitants de Ninive auraient­ils eu une chance de changer ? Nous ne le saurons jamais.

[118](retour) JPC. 11 FEV 2021.